Art & Connaissance

Les amateurs sont des jeunes musiciens rock qui parcourent le Kazakhstan dans un minibus vétuste. Ils ne rencontreront aucun succès. Le motif tchékhovien d’éloignement avec toute ville d’importance rend leur tentative dérisoire.

Le film est composé de collages de tranches de vie, parfois burlesques, où l’on perçoit le fossé qui se creuse entre les générations. Pourtant le comportement des membres du groupe est très loin de ressembler aux délires destructeurs des rockers occidentaux. Leur plus grande espièglerie consiste à capturer une vache dans leur minibus. Cette histoire va d’ailleurs mal se terminer, car ils la tueront pour ne pas être repérés par un policier, et ils finiront par poursuivre une vieille femme qui les a vus. Pour lui faire peur ? la menacer ? lui parler ? Elle ne leur laisse pas le temps de choisir et leur jure qu’elle ne dira rien. C’est la seule scène un peu délirante, la seule touche négative.

Pour leur dernier concert, il pleut des cordes. Les habitants du village s’abritent un peu plus loin, et les regardent sans le moindre entrain. Le film se termine par une voix off qui nous apprend que les membres du groupe ne se reverront pas, sauf à l’enterrement de l’un d’eux, mort en Afghanistan. On comprend alors seulement maintenant qu’il s’agissait en réalité d’un film sur la jeunesse, sur la fin de cette période de la vie, non pas le passage à l’âge adulte (qui est une dénomination rétrospective et valorisante), mais l’arrêt d’un bonheur, d’une énergie, d’une insouciance qui ne reviendront pas, sauf dans la mélancolie. C’est la fin d’une époque aussi. Exactement comme Y tu mamá también était un film sur la jeunesse et la fin du Mexique. Les derniers moments de ces deux films dégagent, contrastant avec la plupart des autres scènes, la même intensité de tristesse.